« Prendre soin de moi n’a pas de prix »

Nadia a traversé de nombreuses épreuves depuis son jeune âge. Aujourd’hui, elle attache une grande importance à sa santé sexuelle. Honduras, 2023. © Laura Aceituno
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Joanne Lillie Responsable des communications

À San Pedro Sula, une ville du nord du Honduras, la stigmatisation sociale entrave l’accès aux soins médicaux et de santé mentale pour les travailleuses et les travailleurs du sexe. Ouverte en 2021, la clinique de Médecins Sans Frontières (MSF) offre un programme de soins complets. Elle accueille dans un milieu favorable les travailleurs et travailleuses du sexe et les personnes LGBTQI+ qui sont victimes de discrimination en matière d’accès aux soins.

OSER S’EXPRIMER OUVERTEMENT

Nadia est travailleuse du sexe au Honduras. Depuis sa jeunesse, elle a traversé de nombreuses épreuves, dont des sévices et de la toxicomanie.

« J’étais coupée de la réalité, je vivais dans un monde chaotique où tout était en désordre :

mon corps, ma santé », confie-t-elle. Peu d’options s’offraient à elle pour trouver de l’aide. Comme beaucoup d’autres femmes dans de nombreuses régions du monde, Nadia a dû surmonter bien des tabous.

« Dans notre société, la femme ne devrait avoir une vie sexuelle active que dans le cadre du mariage, mais parfois, ce n’est pas découve s’exprim possible », déclare Nadia. « Certaines personnes stigmatisent les jeunes et ne les autorisent pas à avoir recours aux services de prévention. Nous devrions nous montrer un peu plus réalistes. »

« Dans cette clinique, j’ai découvert que l’on pouvait s’exprimer ouvertement. »

Selon Nadia, la stigmatisation et la peur qui y est associée peuvent être dangereuses. Si une femme craint de parler franchement de ce dont elle a besoin pour avoir des rapports sexuels protégés, ou si elle garde le silence lorsqu’un préservatif est défectueux ou mal utilisé, elle s’expose à des complications.

« Parfois, nous n’avons pas la possibilité de parler de notre sexualité ou de nos craintes », ditelle. « Alors, les gens ne demandent pas d’aide à temps, et peuvent même trouver la mort. »

UN ESPACE SÉCURISANT

MSF a dépêché dans la communauté des agents et des agentes de promotion de la santé pour transmettre de l’information sur notre clinique. Leur rôle est de s’assurer que les travailleurs et les travailleuses du sexe ainsi que les personnes LGBTQI+ à San Pedro Sula connaissent l’existence de notre clinique et savent que tout le monde y est bienvenu.

« Dans cette clinique, j’ai découvert que je pouvais parler franchement. Mais il y a des endroits où le personnel de santé ne [vous] traite pas de la même manière. Il vous soigne, mais il vous donne aussi son point de vue sur ce que vous devriez faire ou ne pas faire dans votre vie », explique Nadia.

La santé mentale est un élément clé du programme de soins complets de MSF.

« C’est une bénédiction d’avoir trouvé cet endroit où je peux tout obtenir sur place », dit Nadia. « J’y trouve des services de prévention et de contrôle du VIH, de la syphilis et d’autres infections sexuellement transmissibles, de planification familiale… ainsi que de l’aide psychologique et un soutien social. »

« J’ai compris que tout a un prix, mais que prendre soin de moi n’en avait pas, et j’ai alors commencé à y accorder plus d’importance. »

PRENDRE SOIN DE SOI

Aujourd’hui, Nadia plaide pour que les mères et les filles surmontent les obstacles de la stigmatisation sociale afin d’avoir accès à des services et d’être correctement informées.

Selon Nadia : « L’éducation sexuelle devrait être accessible aux enfants d’un certain âge, et les mères devraient permettre à leurs filles de prendre soin d’elles-mêmes. »

L’équipe de proximité de MSF rend visite aux travailleurs et travailleuses du sexe et aux membres de la communauté LGBTQI+.
Honduras, 2023. © Laura Aceituno

Ruth, une autre travailleuse du sexe à San Pedro Sula, croit à l’autogestion de sa santé : « Prendre en main sa santé signifie être à jour dans ses traitements et venir à la clinique quand on ne se sent pas bien. »

Ruth souligne l’importance de se sentir bienvenue et acceptée dans un centre de soins. Les promoteurs et promotrices de la santé de MSF ont rendu visite à Ruth et à d’autres femmes dans son quartier. Ils et elles leur ont expliqué que les portes de la clinique leur étaient grandes ouvertes, que les médicaments y étaient gratuits et que des tests étaient disponibles.

« Ces personnes nous ont expliqué comment prévenir [les maladies], comment prendre soin de nous. Je me suis sentie à l’aise », affirme-t-elle.

La santé mentale est un élément clé du programme de soins complets de MSF.

« Quand je suis arrivée à la clinique, les premiers jours, j’étais assez déprimée. J’avais le sentiment que ma vie avait perdu son sens. J’ai vu le psychologue pour discuter de tout ce que j’ai dû traverser dans ma vie et cela m’a aidée parce que… les choses n’ont pas été faciles », admet Ruth.

Aux autres femmes, « ces filles magnifiques », Ruth dit ceci : « Le message que je vous adresse, c’est premièrement de prendre soin de vous-même, de vous protéger plus que tout, d’être à jour dans vos tests [médicaux] et de venir consulter. »

« Et deuxièmement, de retenir que la clinique est là pour soutenir toutes les femmes qui en ont besoin, qui sont déprimées ou autres, et pour leur apporter du soutien. »

LE BIEN-ÊTRE SEXUEL ENTRE LES GÉNÉRATIONS

« Personnellement, j’ai trop souffert pendant la période où je ne prenais pas soin de moi », confie Nadia. « J’ai choisi et j’ai appris, grâce à la thérapie, que c’est ma vie, que c’est ma responsabilité, et q e c’est l’héritage que je laisserai à mes filles. »

« La sexualité est belle, elle est merveilleuse, c’est quelque chose dont on doit profiter en tant qu’être humain. Mais pour en profiter pleinement, il faut prendre soin de soi. »

Nadia consulte une membre du personnel de MSF à la clinique de San Pedro Sula. Honduras, 2023. © Laura Aceituno

Nadia s’appuie sur son expérience pour encourager d’autres femmes. « Mes chères amies, informez-vous, prenez soin de vous pour que plus tard, vous n’ayez pas à souffrir de traumatismes ou de complexes et à vivre avec un sentiment de culpabilité. »

En juillet 2021, MSF a ouvert une clinique à San Pedro Sula pour améliorer l’accès aux soins de santé des travailleuses et travailleurs du sexe
et des membres de la communauté LGBTQI+. Honduras, 2023.
© Laura Aceituno

MSF a ouvert la clinique de San Pedro Sula en juillet 2021. Elle offre des services de santé mentale, de santé sexuelle et reproductive à la communauté et améliore l’accès aux soins pour les travailleuses et les travailleurs du sexe et les personnes LGBTQI+. Située au centreville, la clinique prodigue également des soins complets aux survivantes et aux survivants de violences sexuelles.