La neutralité et l’impartialité sont au cœur du travail médico-humanitaire d’urgence de Médecins Sans Frontières (MSF). C’est pourquoi MSF a comme seul objectif d’assurer la santé et le bien-être des personnes et ne prend pas de position qui compromettrait sa capacité à atteindre ceux et celles qui ont besoin d’assistance.
Mais cela ne veut pas dire que nous gardons le silence. Le témoignage est un élément fondamental du mandat de MSF : nous parlons de ce que nous voyons lorsque nous fournissons des soins, et nous sensibilisons le public non seulement aux situations de crise qui affligent les communautés avec lesquelles nous travaillons, mais aussi aux causes de leurs souffrances.
Dans certains cas, nos efforts dépassent la simple sensibilisation et peuvent aller jusqu’à exiger un changement spécifique. MSF s’engage alors dans le plaidoyer : nous pressons à agir ceux et celles qui ont la capacité et la responsabilité de s’attaquer aux causes des souffrances que nous voyons, qu’il s’agisse de gouvernements, d’institutions, d’agences, de sociétés privées ou autres.
L’une des priorités du travail de plaidoyer de MSF est l’accès mondial et équitable aux médicaments. En 1999, MSF a lancé la Campagne d’accès, une initiative de plaidoyer à travers laquelle MSF milite pour que des médicaments essentiels soient plus accessibles aux personnes qui en ont besoin dans les pays à faible revenu.
« Depuis que MSF a commencé à fournir une assistance médicale humanitaire aux personnes en détresse, mes collègues sont confronté·e·s à des pénuries importantes d’outils médicaux efficaces pour répondre aux besoins de santé de ceux et celles à traiter », explique Lara Dovifat, conseillère de campagne et de plaidoyer de la Campagne d’accès de MSF. « Nous continuons donc à mener toutes les batailles, un médicament à la fois, un vaccin à la fois, pour un accès plus équitable. »
Certains de ces combats ont porté leurs fruits, notamment en faisant baisser le prix de certains traitements contre le VIH/sida et la tuberculose, et de certains vaccins contre des maladies comme la pneumonie. Les efforts se poursuivent pour réduire les obstacles aux soins chez les personnes souffrant d’un large éventail de maladies, mais de nombreux défis subsistent dans l’accès aux technologies médicales essentielles dans le monde.
« Nous sommes tous et toutes animé·e·s par la même profonde conviction que les médicaments doivent être accessibles à tous ceux et celles qui en ont besoin, et pas seulement aux personnes qui ont les moyens de payer », dit Lara Dovifat.
Le plaidoyer de MSF ne se limite pas à l’accès aux médicaments. Nous plaidons également pour que des mesures soient prises pour répondre aux besoins humanitaires directs, par exemple en demandant aux pays de modifier leurs politiques migratoires qui mettent en danger des personnes migrantes, réfugiées ou demandeuses d’asile. De plus, nous avons appelé les autorités dans les endroits où nous travaillons à éliminer les obstacles aux soins humanitaires, et demandé aux Nations Unies et à d’autres agences à mieux protéger les personnes civiles et le personnel de santé dans les zones de conflit.
Certes, il y a des limites à ces actions : après tout, MSF est un prestataire de soins médicaux d’urgence, et non pas une organisation de plaidoyer. Toutefois, les objectifs ultimes de notre travail médical et humanitaire sont de prévenir les décès évitables et de réduire les souffrances humaines – donc chaque fois que nous avons la possibilité d’influencer les décideurs qui peuvent aider à produire ces résultats, nous la saisissons. C’est pourquoi MSF s’efforce de maintenir un vaste réseau de canaux de plaidoyer, de sorte à communiquer directement avec les gouvernements, les groupes non étatiques et toute autre personne ayant une influence sur l’accès aux soins de santé dans les milieux où nous travaillons.
« Nous continuons donc à mener toutes les batailles, un médicament à la fois, un vaccin à la fois, pour un accès plus équitable. »
« Le plaidoyer en santé publique mondiale peut parfois être lent et frustrant », explique le Dr Jason Nickerson, représentant humanitaire de MSF au Canada. « Les raisons derrière les besoins humanitaires et médicaux non satisfaits dont les équipes de MSF sont chaque jour témoins dans le monde peuvent être relativement claires – pauvreté, conflit, dégradation de l’environnement –, mais les solutions potentielles sont complexes, et les parties les plus responsables arrivent souvent à éviter la responsabilité directe. C’est aussi la raison pour laquelle il est essentiel pour MSF d’utiliser sa voix et de soutenir les patients et les patientes, et parfois même de parler en leur nom. »
L’approche MSF de l’action médico-humanitaire est centrée sur le rejet de toute ingérence politique dans l’accès aux services de santé essentiels. Nos équipes se concentrent sur les besoins immédiats, plutôt que de dicter des règles.
Mais nous avons vu de nos yeux comment les décisions politiques peuvent faire la différence entre la vie et la mort, en particulier pour les communautés marginalisées. Donc, même si nous conservons notre neutralité et notre impartialité fondamentales, nous utilisons notre voix pour tenter d’obtenir, de toutes les manières possibles, les meilleurs résultats pour nos patients, nos patientes et leurs communautés.
LES EFFORTS DE PLAIDOYER DE MSF DANS LE MONDE
BENTIU, SOUDAN DU SUD
En 2014, MSF a commencé à fournir des soins médicaux aux personnes se trouvant dans le camp de protection des civil·e·s de Bentiu, géré par l’ONU, où des dizaines de milliers de personnes fuyant la violence du conflit civil au Soudan du Sud s’étaient réfugiées. Depuis, nous avons maintes fois plaidé auprès des autorités des camps pour qu’elles améliorent les conditions de vie horribles qui y sévissent, notamment en ce qui a trait à la piètre qualité de l’eau et de l’assainissement qui ont contribué aux épidémies d’hépatite E et d’autres maladies. Récemment, le camp a été redessiné comme un camp pour les personnes déplacées à l’intérieur du pays et est maintenant géré par le gouvernement du Soudan du Sud.
ACCÈS AUX MÉDICAMENTS ANTITUBERCULEUX
En 2020, MSF a demandé à Johnson & Johnson d’abaisser le prix de la bédaquiline, un traitement contre la tuberculose grandement nécessaire et efficace, et qui a fait l’objet d’une étude prouvant la possibilité de la produire et de la vendre à profit pour la modique somme de 25 cents par jour. Pourtant, Johnson & Johnson persiste à exiger un prix de plusieurs fois supérieur à ce seuil.
COVID-19
Depuis le début de la pandémie, MSF a appelé les gouvernements de la planète, qui ont versé des milliards de dollars d’argent public pour le développement de vaccins contre la COVID-19, à prendre des mesures pour rendre ces vaccins plus accessibles à l’échelle mondiale. MSF a spécifiquement appelé à une action à l’Organisation mondiale du commerce pour soutenir le partage de la propriété intellectuelle sur les innovations médicales liées à la COVID-19.