Message du directeur général

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Joseph Belliveau Directeur général MSF Canada

« Les médicaments ont été volés. »

C’est ce que me dit le responsable d’une clinique de l’est de la République démocratique du Congo (RDC), sans nommer quiconque, par crainte de représailles.

À cause de cela, poursuit-il, le centre de santé est à peine fonctionnel. L’accès aux soins est limité pour les gens de la ville ainsi que pour les milliers de personnes nouvellement arrivées après avoir fui, quelques jours auparavant, les violences dans leurs villages d’origine.

Au début de l’année, j’ai effectué une courte affectation avec l’équipe d’urgence de Médecins Sans Frontières (MSF) en RDC. Le 30 avril, nous avons reçu une alerte indiquant qu’un nouveau camp de personnes déplacées s’était formé et qu’au moins un enfant était mort. Il s’agissait d’un cas suspecté de choléra. Dès le lendemain, une petite équipe a chargé deux véhicules MSF de médicaments et a quitté Goma, la capitale de la région et notre base.

Après deux heures et demie de voyage mouvementé, nous avons enfin aperçu le camp, perché sur une colline. Le soleil y faisait miroiter les morceaux de plastique blanc qui recouvrent des centaines d’abris étroitement regroupés.

« La même violence qui perturbe les soins de santé augmente aussi les besoins à cet égard. »

Nous avons tout de suite constaté la vulnérabilité des gens en matière de santé. Certains enfants avaient le ventre gonflé et les cheveux orangés, signes de malnutrition. Plusieurs montraient des infections cutanées bien visibles. Les responsables du camp nous ont dit que le choléra et la rougeole s’étaient également installés. Alors que je marchais sur les étroits sentiers séparant de minuscules abris de fortune, je n’ai pas été surpris. Des familles entières s’entassaient pour trouver refuge dans ces constructions temporaires.

Leontine Ntabanga (à gauche) et Samuel Mugabo travaillent avec MSF au camp de Rusayo, dans le Nord-Kivu, pour distribuer des
médicaments aux personnes déplacées. Leontine étudiait pour devenir infirmière, à Kitchanga. Elle se trouve dans le camp depuis avril, après
avoir été déplacée à la suite d’affrontements dans sa ville natale. Samuel, infirmier, est récemment arrivé au camp après avoir fui le territoire
de Masisi. République démocratique du Congo, 2023. © Michel Lunanga/MSF

Des dizaines de groupes armés opèrent en RDC et la violence permanente, ou la menace d’une telle violence, met en danger la santé des communautés, forçant de nombreuses personnes à quitter leur foyer. Souvent, cette violence oblige également les services médicaux à interrompre leurs activités.

Lors de mon affectation de trois semaines, nous avons appris que de nombreux hôpitaux ou cliniques avaient été pillés, que des médicaments avaient été volés et que le personnel de santé avait fui. La violence qui perturbe les services médicaux augmente du même coup les besoins, et c’est là que MSF intervient.

Nous répondons aux urgences dans tout le pays. Nous comblons les lacunes dans la fourniture de soins de santé, qui vont des services hospitaliers aux cliniques mobiles, en passant par la réponse aux violences sexuelles, l’approvisionnement en eau et les campagnes de vaccination.

Dans ce numéro de Dépêches, nous explorons les façons dont les communautés marginalisées en RDC et dans d’autres parties du monde sont confrontées à des besoins aigus en matière de soins et à l’exclusion des services médicaux. Il s’agit notamment des travailleurs du sexe et des communautés LGBTQ2S+ au Honduras, des femmes, patientes ou travailleuses de la santé en Afghanistan, et des personnes contraintes d’entreprendre de périlleux voyages à travers le Mexique, en quête de sécurité.

C’est précisément dans ces espaces marginaux où la vulnérabilité des personnes est accrue, parfois délibérément, et où l’accès aux soins est restreint que MSF s’efforce d’être présente. Être présent et pertinent pour les communautés signifie s’engager avec les gens. C’est aussi comprendre le caractère unique de leur situation, respecter la dignité et l’autonomie des personnes et surtout, trouver des moyens d’exprimer notre humanité à travers les soins de santé. Merci de faire partie de notre travail.